Naissance du Delta de l’Okavango
Il y a 60 000 ans, le fleuve Okavango se déversait dans un immense paléo-lac occupant une large partie du Botswana, quand un puissant tremblement de terre secoua la région et bloqua définitivement sa route.
Interrompue dans sa course, l’eau du fleuve s’est éparpillée dans le désert du Kalahari, inondant les plaines environnantes, et créant sur un simple coup du destin, l’une des plus grandes oasis naturelles de la planète : le Delta de l’Okavango.
Depuis, cet écosystème unique repose sur un phénomène fascinant qui n’existe nulle part ailleurs et qui supporte une grande variété de faune et de flore sauvages. Ses paysages paradisiaques aux ressources abondantes en eau fraiche et en poisson ont aussi conquis le coeur des Bayeyi qui ont choisi de s’installer sur les rives du fleuve dès le 18e siècle.
Aujourd’hui, le fleuve charrie environ 11 km3 d’eau chaque année. Ses marais s’étendent sur une superficie de 6 000 à 15 000 km2 selon la période. Le terrain inondable a tenu le développement humain à distance et la faune est restée sauvage comme elle l’était il y a 10 000 ans. Les hippopotames ont trouvé ici leur paradis, créant des labyrinthes et des chemins à travers plus de 150 000 îles. Les éléphants ont prospéré jusqu’à former d’impressionnants troupeaux. Les lions se sont adaptés à la chasse sur ce terrain humide, bravant leur phobie de l’eau.
Mais ce qui est encore plus spécial avec le Delta de l’Okavango, c’est son comportement imprévisible, faisant l’objet de toutes les spéculations. A chaque visite qu’on lui rend, sa géographie n’est jamais complètement la même et ne sera probablement plus jamais la même. Si bien qu’on peut revenir encore et encore, et vivre des expériences uniques à chaque fois. Une chose est immuable cependant : son atmosphère si paisible qu’on s’y sent bien immédiatement. Ses paysages sont si beaux qu’on ne se lassera jamais d’observer la silhouette de ses grands palmiers.
Et l’eau apporta la vie dans le désert du Kalahari
Comprendre le Delta, c’est savoir différencier la saison des pluies de la saison des inondations. En effet, ces deux événements naturels bien distincts se combinent pour rythmer la vie de ce territoire préservé et alimenter les rivières aussi bien que les conversations.
L’eau. Un élément crucial, devenu si fragile au fil des ans. Pourtant, le Delta en a vu passer des sécheresses terribles et des inondations prodigieuses. C’est sa vie, souvent dans l’excès, rarement dans la moyenne. On s’inquiète pour lui en secouant la tête comme on frétille de joie alors que l’eau avance doucement pour se répandre dans ses artères et redonner tout son éclat à des marais asséchés.
Par son miracle, le Delta a formé les contours d’un véritable sanctuaire de la vie sauvage. Ses eaux vivifiantes distribuent de l’oxygène et déplacent des tonnes de sédiments qui contribuent à la formation de ses îles. A la façon d’une rizière, des herbes nutritives émergent dans les plaines inondables peu profondes et nourrissent des milliers d’herbivores, des antilopes aux hippopotames, en passant par les zèbres, les phacochères et les buffles. Ces derniers attirent à leur tour une belle population de prédateurs en pleine forme, qui trônent fièrement en haut de la chaine alimentaire.
Les plantes soutiennent toutes les autres formes de vie visibles dans le Delta de l’Okavango, du plus petit insecte au plus grand des éléphants, en passant par les poissons, les amphibiens, les reptiles, les oiseaux et tous les autres animaux, qu’ils soient végétariens ou non. Ici, dans ce qui était un désert, tout dépend de l’eau et des plantes.
Quand on a la chance d’assister à sa transformation, il est incroyable de constater à quel point l’eau modifie le paysage. Chaque année, elle suit des itinéraires différents en fonction de l’évolution du terrain, et modifie la forme du Delta. Plusieurs facteurs entrent en jeu : la quantité d’eau restante des inondations précédentes, le volume des précipitations locales pendant la saison des pluies, la façon dont les animaux comme les hippopotames ou les éléphants déplacent les sédiments … tous cela a une incidence sur l’assèchement des lits des rivières et sur la vitesse à laquelle les eaux circulent.
Ajoutez à ces nombreux paramètres que les mois secs (en termes de pluie) sont les mois les plus humides (en termes d’inondation) et la confusion règne joyeusement.
Alors reprenons depuis le début.
Comment se produisent les crues du Delta de l’Okavango ?
Le rôle des pluies en Angola
Avant qu’il ne devienne ce fantastique delta intérieur, le fleuve Okavango nait d’un simple ruissellement au coeur des hauts plateaux reculés d’Angola. Alors qu’il est au début d’un long voyage à travers 3 pays, celui qui s’appelle alors Cubango puise force et vigueur auprès de ses affluents. Il fusionne ensuite avec la rivière Cuito à la limite de la Namibie. Le fleuve prend ici le nom de Kavango et se fait finalement appeler Okavango au Botswana.
A partir de Gumare, l’eau heurte une ligne de faille. La rivière se transforme alors en un éventail formant une main. Ses 5 doigts représentent autant de cours d’eau, eux-mêmes divisées en d’innombrables affluents. Ils changent de noms au fur et à mesure de leur avancement, et terminent leur course dans différents déversoirs qu’ils n’atteignent pas toujours.
Depuis sa source en Angola, le fleuve parcourt pas moins de 1600 km. Il fournit 80% de l’eau du Delta sous la forme de crues qui se produisent en plein hiver austral, entre la fin du mois de mai et le début du mois d’août.
Le rôle des pluies locales
Les 20% restant sont apportés par les pluies locales qui arrosent le Botswana pendant l’été austral, entre Novembre et Avril. La saison des pluies a toute son importance dans le développement du Delta car elle conditionne le terrain. Les précipitations redonnent vie à la végétation, remplissent d’eau les cuvettes asséchées et tapissent le lit des rivières. Elles préparent ainsi les sols à l’arrivée des inondations qui pourront se répandre plus vite et plus loin.
Comme au Botswana, les pluies sont les plus intenses en Angola entre Janvier et Mars. Mais la crue du fleuve Okavango prend des mois avant d’atteindre le delta lui-même, et encore plusieurs semaines avant que l’eau ne parvienne à son niveau le plus élevé. Celui-ci est généralement observé en Juin / Juillet. La décrue intervient à partir du mois d’Août par un phénomène d’évaporation, au moment où les températures grimpent très fortement au Botswana.
On ne sait donc jamais à quoi s’attendre, d’autant que les mouvements tectoniques influencent aussi la direction de l’eau. Par exemple, la crue de 2023 s’est concentrée sur la rivière Khwai et le nord du Delta. Du côté Sud, la rivière Boro a complètement été délaissée alors qu’elle est la première source de la rivière Thamalakane passant à Maun. En 2022, c’est plutôt la rivière Gomoti qui a pris la tête de la course, montrant à quel point cet écosystème vivant peut surprendre chaque année.
Pendant les années les plus folles, l’eau peut atteindre la rivière Nhabe et lac Ngami, alimenter la rivière Boteti jusqu’au lac Xau, s’écouler dans le canal de Selinda. Elle peut également ranimer le canal de Savuti par un jeu de tectonique et de déversement combiné avec la rivière Kwando. Les pans de Makgadikgadi ne reçoivent de l’eau qu’en cas de crues exceptionnelles.
Pourquoi la dynamique de l’Okavango est importante pour les selfdrivers ?
Vous l’avez compris, le comportement du Delta est incertain. C’est pourquoi les conditions de circulation à Moremi et à Khwai sont difficiles à anticiper. Pendant la saison des pluies, le terrain devient vite détrempé et les pistes peuvent devenir infranchissables. Pendant la période des crues, la montée des eaux envahit les pistes saisonnières et coupent certains accès. Les paysages peuvent changer radicalement pour une durée indéterminée. Et ce qui était vrai hier ne l’est parfois plus dès le lendemain.
Pendant la grande sécheresse de 2019, le Delta n’avait plus rien d’une oasis idyllique . Les animaux ont beaucoup souffert dans cet environnement sec et poussiéreux. Les activités d’eau étaient devenues impossibles dans une grande partie du territoire. Cette année là, Maun avait été complètement privé de sa rivière Thamalakane. On redécouvrait des pistes oubliées à Moremi. On roulait sans difficulté dans les plaines inondables de Dead Tree Island et de Doug’s Island.
A l’inverse, l’eau prive parfois les visiteurs de larges sections de la réserve. Bodumatau s’est retrouvé sous l’eau pendant plusieurs années, profitant de la sécheresse de cette année 2024 pour se dévoiler à nouveau. Les pistes longeant la rivière Khwai ou entourant Second Bridge ont nécessité des détours et des retours. Des ponts ont été endommagés, des voitures se sont même noyées !
Mais c’est bien ce qu’on vient chercher ici : l’aventure et le plaisir immense de vivre des expériences qui resteront les siennes à jamais.
Bonjour, je suis Julie

Co-fondatrice de Tawana Self Drive et travel designer experte des safaris self-drive, je raconte ici 10 ans d’explorations, d’observations et de vie quotidienne au Botswana.
Cycle de vie du Delta de l’Okavango
Notre conseil : Le meilleur moment pour observer toute la merveille du Delta de l’Okavango se situe entre Juillet et Septembre. En dehors de cette période, quand l’eau commence à arriver ou qu’elle se retire des plaines inondables, optez pour des lodges et des campings situés le long des rivières permanentes.
Bonjour, je suis Julie

Co-fondatrice de Tawana Self Drive et travel designer experte tout terrain des safaris self-drive, je vous raconte ici 10 ans d’explorations, d’observations passées au Botswana, entre de merveilleuses rencontres et des phénomènes prodigieux, en plus de quelques petites réjouissances du quotidien.